Fables de La Fontaine - Le loup et le chien 狼与狗 - lu par Renlai Zhu
Le Loup et le ChienFable n° 5, Livre IUn Loup n’avait que les os et la peau,Tant les Chiens faisaient bonne garde.Ce Loup rencontre un Dogue aussi puissant que beau ;Gras, poli, qui s’était fourvoyé par mégarde.L’attaquer, le mettre en quartiers,Sire Loup l’eût fait volontiers.Mais il fallait livrer bataille ;Et le Mâtin était de tailleA se défendre hardiment.Le Loup donc l’aborde humblement,Entre en propos, et lui fait complimentSur son embonpoint qu’il admire :Il ne tiendra qu’à vous, beau Sire,D’être aussi gras que moi, lui repartit le Chien.Quittez les bois, vous ferez bien :Vos pareils y sont misérables,Cancres, hères, et pauvres diables,Dont la condition est de mourir de faim.Car quoi ? Rien d’assuré ; point de franche lippée ;Tout à la pointe de l’épée.Suivez-moi ; vous aurez bien un meilleur destin.Le Loup reprit : Que me faudra-t-il faire ?Presque rien, dit le Chien, donner la chasse aux gensPortants bâtons, et mendiants ;Flatter ceux du logis ; à son Maître complaire ;Moyennant quoi votre salaireSera force reliefs de toutes les façons ;Os de poulets, os de pigeons :Sans parler de mainte caresse.Le Loup déjà se forge une félicitéQui le fait pleurer de tendresse.Chemin faisant il vit le col du Chien pelé.Qu’est-ce là, lui dit-il ? Rien. Quoi rien ? Peu de chose.Mais encor ? Le collier dont je suis attachéDe ce que vous voyez est peut-être la cause.Attaché ? dit le Loup, vous ne courez donc pasOù vous voulez ? Pas toujours ; mais qu’importe ?Il importe si bien, que de tous vos repasJe ne veux en aucune sorte ;Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.Cela dit, Maître Loup s’enfuit, et court encore..